Comment se définit la notion d’abus de droit fiscal ?

Introduction

Selon Maurice Cozian, professeur en droit fiscal, « il n’a jamais été dit nulle part que, face à deux solutions possibles, l’une plus coûteuse et l’autre plus économique, il fallait nécessairement choisir la solution où l’on payait le plus d’impôt…Si une certaine habileté fiscale est une vertu respectable, elle ne doit pas, à peine de devenir coupable, franchir certaines bornes…Il n’est pas interdit d’être malin, à condition de ne pas trop faire le malin… ».

L’optimisation fiscale est une liberté qui trouve sa source dans le droit lui-même.

La jurisprudence du CE le reconnaît également : arrêt n°365850 du 08 juillet 2015 : « rien n’impose de prendre la voie la plus coûteuse fiscalement ».

Est-ce que j’applique le droit suivant ce qui a été recherché par le législateur ?

Ce n’est pas une notion fiscale. C’est une notion générale qui existe dans toutes les branches du droit. Il se trouve qu’en matière de fiscalité, on a une définition.

L’abus de droit fiscal recouvre 2 comportements :

–       La simulation qui s’entend des « actes fictifs dissimulant la véritable portée d’un contrat ou d’une convention » (définition légale = article L64 du Livre des Procédures Fiscales).

–       La fraude à la loi qui au contraire de la précédente n’implique pas une volonté de déguisement, mais dont le seul motif est « d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales que l’intéressé aurait normalement supportées eu égard à sa situation et à ses activités réelles » (définition du Conseil d’Etat 10.06.1981).

La frontière entre ces 2 situations n’est cependant pas toujours évidente. Aussi n’est-il pas rare que l’administration invoque à la fois l’une et l’autre.

La définition de l’article L64 du LPF est très claire :

  • Il faut être en présence d’un acte juridique.
  • Un montage qui masque la réalité.
  • Éluder l’impôt.

En effet, conformément à la rédaction de l’article L64 du LPF, le motif exclusivement fiscal ne suffit pas, seul, à établir l’abus de droit. Encore faut-il que l’auteur de l’acte ait recherché le bénéfice d’une application littérale des textes contraire à l’intention du législateur.

Jurisprudence

Voir la décision du CE du 07/09/2009 : la poursuite d’un but exclusivement fiscal n’est pas suffisante pour qu’il y ait abus de droit si l’opération frauduleuse n’était pas contraire aux objectifs poursuivis par le législateur.

Des exemples d’actes requalifiés ou requalifiables

– une vente sans remise du prix = donation déguisée = abus de droit

– un usage abusif de son droit = abus de droit

– un acte juridique fictif = une société civile qui ne fonctionne pas

– une vente à un prix très bas = donation indirecte = abus de droit

– une donation en nue-propriété suivi d’une convention de quasi-usufruit = risque d’abus de droit

Les sanctions qui frappent l’abus de droit sont particulièrement sévères. Le contribuable risque une amende égale à 80 % des droits éludés, à laquelle s’ajoute un intérêt de retard de 0,40 % par mois (soit 4,80 % / an).

Le CADF

En cas de désaccord entre l’administration et le contribuable sur le bien-fondé de l’application de la procédure de répression des abus de droit, le litige peut être soumis à l’avis du CCRAD (Comité Consultatif pour la Répression des Abus de Droit), rebaptisé Comité de l’Abus de Droit Fiscal (CADF), à l’initiative de l’un d’entre eux. Composé de 4 membres (un conseiller d’Etat, un conseiller à la Cour de cassation, un professeur des facultés de droit et un conseiller-maître à la Cour des comptes), le Comité ne rend certes pas de décision, mais émet des avis.

S’ils ne lient pas l’administration, ni le juge en cas de contentieux, ces avis déterminent la charge de la preuve. Ainsi, en l’absence de saisine, la charge de la preuve pèse sur l’administration. En cas de saisine, et si l’avis est défavorable à l’administration, celle-ci garde la charge de la preuve. En revanche, si l’avis est défavorable au contribuable, c’est lui qui endossera la charge de la preuve et qui, en cas de contentieux, devra prouver l’absence d’abus de droit.

La publication annuelle du rapport du Comité consultatif pour la répression des abus de droit donne l’occasion de relever les opérations qui éveillent tout particulièrement les soupçons de l’administration fiscale.

 

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