Réserve, usufruit successif et abandon d’usufruit

Article 949 du Code Civil : « Il est permis au donateur de faire la réserve à son profit ou de disposer, au profit d’un autre, de la jouissance ou de l’usufruit des biens meubles ou immeubles donnés. »

--> La réserve d’usufruit par le constituant à son profit peut être faite au profit de chaque donateur.

--> La stipulation d’un usufruit successif permet à un époux qui donne la NP d’un bien à ses enfants en se réservant un premier US sa vie durant (usufruit viager), de prévoir un second US au profit de son conjoint. Au décès de l’époux donateur, l’US successif s’ouvre alors au bénéfice du survivant. Faute d’être propriétaire ou nu-propriétaire, le disposant resté usufruitier ne peut plus alors constituer de nouvel usufruit. Il peut juste transmettre cet usufruit mais ce dernier s’éteint au plus tard avec lui. Le nu-propriétaire reçoit une nue-propriété grevée d’un certain nombre d’usufruits. Il ne recouvrera la PP du bien donné qu’au terme du dernier US stipulé. Ce qui est appelé « réversion » d’usufruit est donc la combinaison dans le temps de l’exercice de plusieurs US appelés à s’ouvrir successivement.

Ou encore, dans le cadre d’une donation-partage transgénérationnelle, les grands-parents peuvent donner la NP à leurs petits-enfants tout en se conservant l’US, et en prévoyant un usufruit successif au profit de la 2ème génération. Au décès des grands-parents, l’usufruit reviendra aux enfants et non directement aux petits-enfants. Cet usufruit sera taxable. Les enfants « renonçants » s’assurent un flux de revenus futurs tout en ayant évité que le bien n’entre dans leur patrimoine successoral.

Dans un arrêt du 08 juin 2007, la Cour de Cassation a qualifié la réversion d’US de « donation à terme de biens présent ». Une stipulation de réversion est donc bien soumise aux « droits de donation » et non aux « droits de succession » comme la doctrine administrative antérieure le prévoyait. Cette position a été confirmée par un arrêt de la Cour d’appel de Colmar du 13 mars 2008.

Dans ce même arrêt, la Cour de Cassation confirme que le droit d’usufruit de l’époux survivant lui étant définitivement acquis dès le jour de l’acte de donation, l’exercice de ce droit, différé au jour du décès du donateur ne constitue pas la manifestation de volonté de son bénéficiaire d’accepter la succession du défunt.

Par rapport à la loi sur le divorce du 26 mai 2004, la réversion d’usufruit, qualifiée de donation à terme de bien présent, est logiquement une donation de biens présents qui ne prend pas effet au cours du mariage, reste révocable.

Lorsqu’elles sont antérieures à la loi TEPA du 21 août 2007, les réversions d’US sont donc taxées aux droits de donation au jour de l’acte les stipulant. Une réponse ministérielle du 18 mars 2008 en a pris acte et en a déduit que les réversions d’US au profit du conjoint survivant consenties antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi TEPA sont effectivement « taxées au jour de l’acte de donation ».

Remarques

– Depuis la loi TEPA d’août 2007, cet usufruit réversible au profit du conjoint (ou partenaire de pacs) survivant n’est désormais plus taxé. L’administration fiscale traite cet usufruit successif comme un droit né de la succession et non de la donation.

– La renonciation à un droit d’usufruit non encore acquis n’est cependant pas assimilée à une transmission.

Il faut s’interroger sur le besoin de conserver ou non un usufruit viager important car avec la modification de la valeur de l’usufruit, lorsqu’on donne avant l’age de 61 ans, l’usufruit vaut 50 %.

--> En cas d’abandon d’usufruit ultérieur, parce que le donateur n’en a par exemple plus l’utilité ou que le donataire a mûri, on a à nouveau les droits de donation sur la valeur de l’usufruit à cette date à acquitter. Le transfert est alors taxé comme une donation, même s’il n’est pas formalisé. L’usufruit est évalué sur la base du barème fiscal en fonction de l’espérance de vie de l’usufruitier au moment de son abandon. Il peut donc échapper à l’impôt si inférieur aux abattements.

Pour éviter cela, on peut procéder à des donations de la nue-propriété de biens pour lesquels le donateur se réserve un usufruit temporaire qui tombe automatiquement à une date déterminée, cet usufruit temporaire pouvant n’être que partiel et couplé avec un usufruit viager qui pour protéger le conjoint survivant peut être lui stipulé successif. L’intérêt étant qu’à la date donnée, il n’y aura aucun droit à payer sur l’usufruit réservé temporairement. Il est évalué à 23 % de la PP par tranche de 10 ans. On évitera de se laisser tenter fiscalement par une réserve d’usufruit de quelques années seulement.

Réponse Ministérielle

Les contribuables qui ont renoncé à un usufruit postérieurement au 01 janvier 2004 et qui ont, du fait de la revalorisation de son barème, subi une taxation sur plus de 100 % du bien donné en nue-propriété avant cette date, peuvent déposer une demande en restitution (Rép. Min. du 21 septembre 2006).

 

Un commentaire sur “Réserve, usufruit successif et abandon d’usufruit

  1. ABELLO Michel says:

    Madame, Monsieur bonjour,
    Je posséde un appartement suite à une donation au partage avec un droit d’usufruit pour mon père et ma belle mère ( sa deuxième épouse). Mon père est décédé au mois d’aout 2018. Ma belle mère m’informe à ce jour qu’elle renonce à son usufruit, ayant contacté son notaire, elle m’informe que je devrais payer la somme de huit mille euros.
    Pouvez vous m’expliquer pourquoi?
    En vous remerciant,
    Cordialement.

    ABELLO M.

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