La protection sociale du conjoint

Souvent indispensable au fonctionnement des petites entreprises, le conjoint qui participe professionnellement à l’activité n’a pas toujours vu son travail reconnu.

La loi de 1982 offrait la faculté de cotiser volontairement à l’assurance volontaire retraite afin de se constituer des droits personnels. Toutefois, ce dispositif méconnu n’était guère utilisé au sein des caisses de retraite.

Le conjoint était censé se contenter d’une simple position de conjoint participant, qui bien qu’exerçant au sein de l’entreprise en qualité d’entraide familiale, ne percevait aucun droit à la retraite.

Depuis le 04 août 2006, (décret publié au JO du 03 août 2006, complétant la loi PME du 02 août 2005 dite loi Jacob), le conjoint exerçant une activité professionnelle régulière au sein de l’entreprise doit être déclaré sous l’un des statuts suivants :

  • conjoint collaborateur
  • conjoint associé
  • conjoint salarié

Depuis le 01 juillet 2007, les femmes d’artisans et de commerçants doivent choisir entre les 3 statuts juridiques : celui de conjoint collaborateur non rémunéré (exclusivement réservé aux personnes mariées), celui d’associé ou celui de salarié. Le premier, le moins protecteur, permet en échange d’une cotisation mensuelle et d’un nombre minimum de trimestres d’assurance, de bénéficier d’une retraite de base et d’une retraite complémentaire.

A chaque situation, un statut mieux approprié.

Les époux désirant se placer sur le même plan et s’impliquer à égalité dans le projet opteront pour le statut de conjoint associé.

Si en revanche un seul des époux est porteur du projet, se posent 2 cas de figure :

– Soit le conjoint perçoit un salaire pour son travail mais ne s’immisce pas dans la gestion de l’entreprise. C’est alors le statut de conjoint salarié qui convient.

– Soit le conjoint collabore régulièrement à l’activité sans percevoir de rémunération ni être associé dans la société. Le statut de conjoint collaborateur sera privilégié.

--> Conjoint associé : sur un pied d’égalité

Mariés, pacsés ou en concubinage, les conjoints peuvent souhaiter s’investir de la même façon dans l’entreprise.

Solutions

Créer une société dans laquelle le conjoint détient un certain nombre de parts sociales lui permettant de revendiquer la qualité d’associé.

Qu’il s’agisse d’un apport personnel, de l’apport d’un bien commun si le couple est marié sous le régime de la communauté ou de celui d’un bien indivis (en cas de Pacs par exemple), la responsabilité du conjoint associé est limitée au montant de son apport (sauf SNC).

Apport d’argent, apport en nature ou apport en industrie (c’est-à-dire que les statuts définissent alors le travail à fournir en échange des parts).

Sa rémunération éventuelle prendra la forme de dividendes, imposés à l’IR dans la catégorie des RCM. Mais le conjoint associé peut également être salarié.

Couverture sociale

Le conjoint est affilié gratuitement au régime d’assurance maladie et maternité en qualité d’ayant droit du chef d’entreprise, à moins de bénéficier par ailleurs d’un autre statut.

Il doit obligatoirement cotiser aux régimes d’assurance vieillesse de base, de retraite complémentaire et d’invalidité/décès de l’exploitant.

En revanche, il ne bénéficie pas de l’assurance chômage.

Avantages

Les avantages du statut d’associé se situent essentiellement au niveau du patrimoine de l’entreprise et de sa transmission. Ainsi, si l’exploitant décède, le conjoint peut demeurer dans la société et y conserver ses responsabilités.

Face aux héritiers, il obtiendra plus facilement l’attribution de toutes les parts sociales pour succéder au chef d’entreprise qui s’il est conjoint salarié ou collaborateur.

Inconvénients

En cas de mésentente entre les conjoints, l’entreprise risque de mettre la clé sous la porte, notamment s’ils sont associés à 50/50.

--> Conjoint salarié : subordination mais protection

Le conjoint salarié participe effectivement à l’activité de l’entreprise à titre habituel et professionnel.

Conditions

Il est titulaire d’un contrat de travail (CDD ou CDI) correspondant à un emploi effectif pour lequel il perçoit un salaire qui doit être normal, c’est-à-dire proportionnel à sa qualification et aux pratiques du secteur, au minimum égal au Smic.

Mais placé en position subordonnée, il n’a aucun pouvoir et n’est pas autorisé à s’immiscer dans la gestion de l’entreprise.

Ce statut intéresse principalement les conjoints de commerçants, d’artisans, de professionnels libéraux ou de dirigeants de société, mariés, pacsés ou en concubinage.

Les conjoints d’artisans ou de commerçants travaillant dans ces conditions au sein de l’entreprise familiale sont d’ailleurs présumés avoir la qualité de salariés (article L 784-1 du Code du Travail).

Même s’il s’agit d’un accord entre conjoints, il est grandement recommandé d’établir un contrat de travail écrit, précisant les fonctions, les horaires de travail, le salaire versé … Contrat qui pourra éventuellement être enregistré au centre des impôts afin de justifier la réalité du statut de conjoint salarié, en cas de conflit avec les organismes sociaux.

Fiscalement, le salaire du conjoint est bien entendu imposé à l’IR dans la catégorie des traitements/salaires.

L’entreprise soumise à l’IS peut déduire intégralement ce salaire, à condition qu’il ne soit pas excessif.

Si en revanche l’entreprise est soumise à l’IR, le salaire pourra être intégralement déduit si le conjoint est marié sous un régime de séparation de biens, ou s’il est marié sous un autre régime matrimonial mais que l’entreprise a adhéré à un centre ou une association de gestion agréé. Mais il sera déduit dans la limite de 13.800 € si le conjoint est marié sous un régime de communauté ou de participation aux acquêts et que l’entreprise n’est pas adhérente d’un centre de gestion agréé.

Notons que les charges sociales afférentes à la rémunération du conjoint sont toujours déductibles intégralement.

Couverture sociale

Le conjoint relève du régime général de sécurité sociale en contrepartie de cotisations salariales et patronales.

Il bénéficie également de la protection offerte aux salariés en matière d’assurance chômage, sous réserve de l’appréciation par les ASSEDIC de la réalité du contrat de travail et du licenciement.

Avantages

Sa responsabilité ne peut être recherchée.

Quant à savoir si son salaire est à l’abri des créanciers du chef d’entreprise, tout dépend de la situation. L’article 1414 du CC prévoit que les gains et salaires d’un époux ne peuvent être directement saisis que lorsque la dette a pour objet l’entretien du ménage ou l’éducation des enfants. Mais une fois payés, les salaires se fondent dans la masse commune des époux et il devient difficile de les distinguer. L’article 1414 du CC prévoit donc qu’une part des sommes figurant sur un compte courant ou de dépôt alimenté par les gains et salaires de l’autre époux soit insaisissable. Ainsi, les salaires d’un conjoint marié sous le régime de communauté ne seront que partiellement saisissables. Idem dans le cadre d’un Pacs.

Pour les concubins et les conjoints mariés sous les régimes de participation aux acquêts ou de séparation de biens, les salaires versés constituent des biens propres, insaisissables par les créanciers de l’exploitant.

Inconvénients

Ce statut est de loin le plus coûteux puisqu’il faut ajouter au salaire les charges sociales patronales et salariales.

--> Conjoint collaborateur : des pouvoirs étendus

Contrairement aux 2 statuts précédents, le statut de conjoint collaborateur ne concerne que les conjoints mariés ou pacsés.

Mais dans sa réponse en date du 21 septembre 2010, la ministre de l’économie précise que ce statut est ouvert au partenaire d’un Pacs. Toutefois, en l’état actuel du droit, ce statut n’est pas ouvert au concubin du chef d’entreprise (une extension dans ce sens est en cours d’étude).

Ces conjoints pouvaient perdre tout droit à la retraite en cas de divorce, de décès ou de départ à la retraite du conjoint. Depuis la loi de 2013 sur les retraites, ces assurés peuvent s’affilier à l’assurance volontaire vieillesse pour ne pas perdre leurs droits.

Conditions

Le chef d’entreprise doit avoir opté pour l’entreprise individuelle ou pour l’EURL.

Ce statut est étendu au conjoint du gérant majoritaire de SARL (loi PME du 02/08/05).

Pour être reconnu conjoint collaborateur, 4 conditions doivent être réunis :

  • participer effectivement et habituellement à l’activité de l’entreprise,
  • ne pas être rémunéré pour cette activité,
  • ne pas avoir de parts,
  • ne pas exercer d’activité en dehors de l’entreprise (un emploi salarié inférieur ou égal à un mi-temps est possible).

Le chef d’entreprise a 2 mois, suivant le début de la collaboration de son conjoint, pour déclarer l’option auprès du CFE. La mention de conjoint collaborateur doit figurer au RCS ou au Répertoire des métiers (sauf pour le conjoint d’un associé unique d’EURL) ou encore à l’URSSAF (profession libérale).

Mention à na pas confondre avec une inscription et qui ne confère pas le statut de commerçant ou d’artisan. Elle trouve sa justification dans le pouvoir que le statut de collaborateur confère au conjoint : il peut accomplir à la place et au nom du dirigeant tous les actes administratifs relatifs à l’exploitation de l’entreprise. Il est présumé avoir reçu un mandat de l’exploitant. Et ce afin d’éviter une paralysie de l’entreprise, en cas de maladie du dirigeant par exemple. Si les époux sont mariés sous le régime de la communauté et que l’entreprise fait partie de la masse commune, le conjoint collaborateur est également habilité à accomplir des actes de disposition (donation, vente…). Il respectera toutefois les règles de cogestion pour la vente du fonds de commerce et des immeubles appartenant à la communauté.

A noter que sa responsabilité personnelle ne peut être engagée dans les actes de gestion et d’administration accomplis pour les besoins de l’entreprise. L’exploitant reste seul responsable vis-à-vis des tiers.

Les conjoints ayant choisi ce statut avant le 04 août 2006 sont donc invités à se mettre à jour avant le 01 juillet 2007.

Jusqu’au 31 décembre 2020, il est également possible de racheter des périodes d’assurance vieillesse dans la limite de 6 ans. Une option intéressante puisque les rachats sont fiscalement déductibles des bénéfices et qu’ils peuvent permettre de réunir le nombre de trimestres requis pour percevoir une retraite à taux plein.

Quant aux cotisations sociales facultatives (Madelin), elles sont déductibles dans les mêmes conditions que celles applicables à l’exploitant.

Ils auront également la possibilité de bénéficier d’un PEE et du droit à la formation professionnelle continue.

En revanche, rien n’est prévu du coté de l’assurance chômage.

Enfin, en cas de décès de l’exploitant, le conjoint qui a participé 10 ans, sans rémunération à l’activité de l’entreprise, peut prétendre à une part de la succession.

Couverture maladie-maternité

Le conjoint bénéficie gratuitement des prestations du régime des professions indépendantes en qualité d’ayant-droit du chef d’entreprise.

En cas de maternité ou d’adoption, la conjointe collaboratrice bénéficie d’une allocation forfaitaire de repos maternel et d’une indemnité de remplacement, si elle se fait remplacer dans son travail par du personnel salarié.

Le père conjoint collaborateur peut bénéficier d’une indemnité de remplacement lors de la naissance ou de l’adoption d’un enfant.

Couverture retraite/invalidité/décès

Ce décret précise que les conjoints collaborateurs ont l’obligation de cotiser au régime d’assurance vieillesse de base, de retraite complémentaire et d’invalidité du chef d’entreprise. Le conjoint collaborateur aura désormais les mêmes droits qu’un salarié en matière de retraite.

Sa cotisation est calculée soit :

  • sur la base du revenu forfaitaire ou un pourcentage du revenu professionnel du chef d’entreprise,
  • soit avec l’accord du chef d’entreprise, sur une fraction de son revenu professionnel. Dans ce cas, la fraction du revenu servant de base de calcul de la cotisation vieillesse du conjoint sera déduite du revenu professionnel pris en compte pour sa cotisation vieillesse.

--> Conjoint collaborateur libéral

Le statut de conjoint collaborateur libéral va être étendu à toutes les professions réglementées (avocats, chirurgiens-dentistes, kinésithérapeutes, infirmières, médecins, notaires, commissaires aux comptes, experts-comptables, géomètres experts, architectes).

Ce statut est étendu au conjoint du gérant majoritaire de SELARL (loi PME du 02/08/05).

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